Pas de terrain, pas d’agriculture! Ce terrain est appelé «parcelle», et c’est l’unité de base qui va constituer les terres d’une exploitation agricole. Revenons sur ce sujet…
Le parcellaire
Un peu de vocabulaire d’abord. L’ensemble des parcelles forme le parcellaire, comme les tuiles d’un toit ou les pièces d’un puzzle. Il s’agit de l’ensemble des parcelles d’un endroit (une exploitation agricole, une commune) ou le plan dessiné par l’ensemble des parcelles. Celui-ci dépend:
• du territoire local;
• de l’histoire;
• des droits de propriété;
• des réseaux de transport;
• de la géomorphologie (relief et géologie dus aux rivières, glaciers…).
Le parcellaire est enregistré auprès du cadastre cantonal, c’est-à-dire du registre foncier.
En zone de plaine, il existe deux types de parcellaire agricole, l’openfield («champ ouvert») et le bocage. L’openfield se trouve dans les grandes plaines fertiles à grandes cultures (blé, maïs, betteraves) comme la Plaine de l’Orbe. Le bocage, où les parcelles sont délimitées par des haies, est utilisé pour l’élevage et se retrouve dans le Jura ou les Préalpes. Les parcellaires de versant et de pente (vignes notamment) sont un peu différents avec des parcelles plus petites dues à la pente et à la difficulté de mécaniser le travail des champs.
Il existe différents types de parcelle cadastrale (zone à bâtir, zone industrielle, forêt, etc.). On parle de parcelle «agricole» pour ce qui concerne les cultures ou l’élevage et c’est ce que l’on appelle communément un champ, une prairie, une vigne ou un verger, soit une surface qui accueille une culture principale qui la distingue des parcelles voisines. Ces parcelles ne sont pas nécessairement cultivées d’une manière uniforme, en particulier quand la parcelle est grande et hétérogène. L’agriculteur peut diviser une parcelle cadastrale en plusieurs «parcelles agricoles», de même qu’une parcelle agricole peut aussi se trouver sur plusieurs parcelles cadastrales.
Forme et composition des parcelles
Maintenant que les mots sont expliqués, place aux aspects pratiques: qu’est-ce qui explique la forme et géométrie des parcelles?
Historiquement, les parcelles étaient souvent établies en fonction de la masse de travail nécessaire. Le parcellaire actuel est le résultat de modifications dues à l’introduction générale des machines, dans la seconde moitié du XXe siècle. La mécanisation a provoqué et nécessité d’importants remaniements parcellaires (remembrements) et la géométrie des parcelles a été refaite et simplifiée. Autrefois étroites, elles ont été élargies et allongées afin de favoriser et de faciliter l’utilisation du tracteur.
Le développement des transports et des réseaux de transport a également influencé les parcelles en provoquant d’importants remembrements le long des routes et des rails. La correction de rivières et les assèchements de marais ont créé de nouvelles parcelles agricoles dans les plaines alluviales et permis la simplification des existantes.
Depuis une trentaine d’années, l’écologisation de l’agriculture a vu le développement des surfaces de promotion de la biodiversité, soit des mesures prises pour favoriser la nature, qui permettent de bénéficier de paiements directs de la Confédération. Pour les parcelles agricoles, cela se reflète au travers de cultures faites pour favoriser la nature – par exemple des prairies extensives, des pâturages boisés ou des mesures comme des bandes fleuries.
Exemple de bordures tampon © Photo: Agridea
Il existe aussi des Prestations Écologiques Requises (PER, obligatoires pour toucher des paiements directs) comme les bordures tampon, qui sont aménagées «le long des eaux de surface, des lisières de forêt, des chemins, des haies, des bosquets champêtres, des berges boisées et des surfaces inventoriées» (Ordonnance sur les paiements directs). Ces aménagements influencent de nos jours considérablement la morphologie des limites de parcelles.
LE SOL DES PARCELLES
Une parcelle agricole c’est également un sol qui a des propriétés variées en termes notamment de matière organique (ce qui va conditionner la fertilité et la capacité à retenir de l’eau), de rapport argile/sable, d’alcalinité (pH) ou de granulométrie (teneur en cailloux). Puisque l’espace qu’occupe une parcelle est souvent dû à des facteurs historiques ou extra-locaux, il peut y avoir une importante hétérogénéité sur une même parcelle. Pour connaître les propriétés du sol sur une parcelle, il est possible de faire des analyses de sol mais aussi un scannage pour avoir une cartographie des propriétés en chaque point de la parcelle.
Le sol d’une parcelle peut varier avec le temps. Il est aussi possible d’effectuer des apports de matière organique, ou encore de tenter d’améliorer tel ou tel endroit qui est par exemple facilement inondé. Les cantons et organisations agricoles mettent aussi en place des programmes de séquestration carbone dans les parcelles agricoles.
La vie DES PARCELLES
Une parcelle agricole a une vie qui passe par plusieurs phases: cultures, et cultures intercalaires (trèfle, luzerne ou couverts végétaux) qui permettent au sol de produire, de se reposer ou de s’enrichir (rotation des cultures).
En Suisse, la rotation des cultures (aussi appelée assolement) sur une parcelle adaptée est une obligation pour recevoir des paiements directs. Cette pratique est une nécessité agronomique pour maintenir une production suffisante, de qualité et durable sans épuiser le sol. Selon l’Ordonnance sur les paiements directs, la rotation des cultures permet ainsi de «prévenir l’apparition de ravageurs et de maladies […] éviter l’érosion, le tassement et la perte du sol, ainsi que l’infiltration et le ruissellement d’engrais et de produits phytosanitaires» (Art. 16, al. 1). La rotation se fait surtout pour les grandes cultures et les cultures maraîchères. Pour les vignes, les vergers ou les prairies permanentes, on ne peut par définition pas changer les cultures régulièrement mais le couvert végétal interrang (entre les pieds) peut varier au cours de l’année.
La biographie d’une parcelle se retrouve dans le «cahier des champs», aujourd’hui électronique, qui permet à l’exploitante ou l’exploitant d’enregistrer pour chaque parcelle ce qui est planté, à quel moment, les fumures (engrais) sont faites, etc. Cela permet de suivre la trajectoire de chaque parcelle et de connaître les besoins et l’évolution de son sol. Ce suivi aide à prendre soin des sols de façon durable.