Quand le bétail s’envoie en l’air

Quand le bétail s’envoie en l’air

Lors de randonnées en montagne, il est possible de croiser des troupeaux qui semblent bien loin de leurs étables et de toute vie humaine. Si un animal a besoin de soins, que font les familles paysannes et comment est-il pris en charge? En Suisse, la Rega répond aux appels à l’aide pour les animaux de rente lorsqu’aucun autre moyen de transport n’est envisageable. Tout est alors mis en œuvre pour réussir l’opération de sauvetage qui nécessite parfois le déplacement de l’animal par hélicoptère.

Interventions sur les alpages

Et oui, comme nous, il arrive qu’un animal tombe malade ou se blesse par accident! En plaine, un vétérinaire peut rapidement intervenir et organiser, si besoin, un transport par voie de terre. Il existe d’ailleurs un service romand d’ambulance dédié au bétail. En Suisse centrale, dans le Jura vaudois ou à Neuchâtel notamment, il est généralement possible de se rendre sur le lieu de l’accident en voiture, télécabine ou téléphérique. Les vétérinaires terminent parfois le trajet à pied avec leur matériel de soins sur le dos.

En revanche, à cause de la structure topographique des montagnes (terrain escarpé, cours d’eau, crevasses, etc.), l’accès s’avère plus complexe. La plupart des interventions de sauvetage en hélicoptère concernent donc les exploitations de montagne et les animaux à l’alpage. En Romandie, ce type d’interventions concerne surtout le Valais, les Préalpes fribourgeoises ou la chaîne du Jura.

Collaboration entre le monde agricole, les services aériens et les vétérinaires

Les familles paysannes n’ont pas l’autorité suffisante pour déterminer l’urgence ou demander le transport de la bête. La situation est évaluée par le vétérinaire responsable de l’alpage car le transport de l’animal est soumis à la législation suisse sur la protection des animaux. Parfois, déplacer l’animal causerait des souffrances trop importantes. Ainsi, un processus clair est en place pour lui porter assistance au plus vite.

L’agricultrice ou l’agriculteur avertit le vétérinaire qui évalue la situation. Si l’aval est donné, la Rega est alors contactée. Celle-ci, une fois informée de la situation et du lieu où se trouve l’animal, mandatera alors une compagnie d’hélicoptères régionale. En 2021, le service d’urgence aérien compte 1’460 interventions sur toute la Suisse. Le Service de prévention des accidents dans l’agriculture (SPAA) précise que ce sont des interventions plutôt rares.

En attendant les secours, les éleveuses et éleveurs rassurent l’animal et tentent de l’apaiser. Apeuré, il peut avoir un comportement nuisible à sa propre santé. Il peut glisser, tomber et mettre sa vie davantage en péril.

Héliport d'une vache nécessitant des soins
© SPAA

Stéphane Thomann, Pilote d’hélicoptère sur la base d’Epagny-Gruyère (FR) chez Swiss Helicopter SA

«En général, quand on reçoit une alerte, on est déjà en mission de transport. À ce moment-là, s’il s’agit d’un animal blessé, nous allons tout faire pour être le plus rapidement sur place. Cela fait toujours chaud au cœur de voir la joie des agriculteurs quand nous arrivons sur le lieu de prise en charge. Nous n’avons jamais vécu une situation où l’agriculteur était énervé. Quand on commence à s’approcher de l’animal, le stress monte. On ne veut surtout pas lui faire mal. Avec la panique, la bête s’embourbe souvent, ce qui rend la pose du filet compliquée. Une fois que celui-ci est mis en place, la manœuvre d’ascension peut commencer. A partir de là, on lève gentiment l’animal pour que le filet se tende doucement autour de lui sans le blesser. Pendant le vol, on garde une vitesse faible. Finalement, on le dépose délicatement pour qu’il souffre le moins possible. Ce qui nous touche le plus avec ce type de mission, c’est qu’on reçoit très souvent une carte ou un appel de l’agriculteur pour nous remercier et donner des nouvelles de l’animal. Il nous arrive parfois qu’il veuille nous donner un pourboire alors que cela ne se fait plus aujourd’hui. Dans ce genre de situation, je me rends compte que ce sont souvent les personnes qui gagnent le moins qui sont les plus généreuses et reconnaissantes.» Propos recueillis pour l’article «Directives et conseils pour réussir le transport d’un animal par les airs» paru dans le journal AgriHebdo.

Est-il possible de prévenir ces accidents?

Héliport d'une vache nécessitant des soins
© SPAA

Jean-François Dupertuis, conseiller agricole chez Prométerre, ironise «peut-être qu’on peut essayer d’aplanir les montagnes?». Les éleveuses et éleveurs font au mieux pour exclure l’accès à des zones dangereuses, mais il ajoute que le bétail peut facilement prendre peur: loups et chiens par exemple peuvent être à l’origine d’un comportement de fuite qui peut se solder en égarement de l’animal ou en blessure. Bien que les parcs soient clôturés pour davantage de sécurité, le terrain alpestre n’offre aucune garantie à ce niveau-là. Le Cabinet vétérinaire de la Forge en Valais ajoute aussi que les glissements de terrain et une mauvaise météo peuvent contribuer à détériorer les enclos en place.

Etienne Junod, responsable Romandie et membre de la direction du Service de prévention des accidents dans l’agriculture (SPAA), confie que des exercices de simulation ont déjà été organisés pour préparer les éleveuses et éleveurs à réagir au mieux lors de ces opérations.

En somme, un animal blessé, égaré ou malade n’est pas condamné, tout est mis en œuvre pour lui venir en aide.


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